9 janvier 2012

Monnaies des ROIS MAUDITS




    Phillippe IV le Bel.  Chacun connaît l’histoire des  " Rois Maudits " , maudits certainement par Maurice Druon, mais maudits aussi probablement par le grand maître Jacques de Molay, sur le bûcher qui devait mettre un terme définitif à la puissance religieuse, guerrière et financière de l’ordre du temple.
    Maudits jusqu’à la treizième génération !
 
    Premier maudit, et donc premier intéressé, c’est le roi lui même, Philippe IV le Bel. D’une beauté légendaire dit-on, il régnait en maître absolu. Il avait taxé les biens d’église, ruiné les banquiers Lombards, spolié les juifs, et rendait l’or, tout à coup moins lourd, ou tout à coup moins cher ! La France était forte et le peuple misérable. Sans en être l’instigateur, puisque son grand père Saint Louis et peut-être son père Philippe le Hardi s’étaient essayé à la création d’une monnaie d’or, c’est vraiment sous le règne de Philippe le Bel que l’on trouve les premières belles monnaies gothiques. Il aura fait frapper cinq monnaies différentes.
D’abord le  » Petit royal « , inspiré d’une monnaie de Philippe III, petite monnaie de 3.49gr,  représentant le roi assis sur un trône, il tient un sceptre et une fleur de lis, au revers une  croix feuillue, cantonnée de 4 lis. Puis la Chaise d’or fait son apparition, c’est une superbe monnaie de 7.09gr d’or pur, représentant le roi assis dans une stalle gothique, couronné et  tenant dans la main droite le sceptre royal fleurdelisé, et dans la main gauche, la main de justice. La Masse d’or reprendra l’image du petit royal, placée dans un polylobe. Le Mantelet, représentera le roi debout, dont la tête empiète sur la légende.  Apparition aussi de l’ Agnel d’or, charmante petite monnaie de 4.19gr, représentant un agneau pascal, à gauche, tête tournée vers la droite et auréolée, au second plan un gonfalon vertical. Sous l’agneau le nom du roi : Ph REX pour Philippe IV, LVd REX pour Louis X, Ph REX * pour Philippe V et KL REX pour Charles IV Bien que maudits, Philippe le bel et ses trois fils qui règneront successivement, frapperont donc cette monnaie à caractère religieux, avec pour légende : (Agneau de Dieu qui efface les péchés du monde prends pitié de nous).
 
Philippe IV le Bel "Petit royal" Philippe IV le Bel " Chaise d'or" Philippe IV le Bel "Masse d'or"
Philippe IV le Bel "Mantelet d'or" Philippe IV le Bel "Agnel d'or" Louis X le Hutin "Agnel d'or"

   Il est très difficile de différencier une monnaie de Philippe III (qui a régné de 1270 à 1285), d’une monnaie de Philippe IV, si ce n’est que jusqu’en 1280 PHILIPE ne prenait qu’un P … et comme la seule monnaie d’or attribuée à Philippe III est légendée PHILIPP’… l’incertitude demeure..
Le Florin d’or à la reine est attribué à Philippe III par CIANI, et à Philippe IV par DUPLESSY..Philippe le Bel mourut en 1314, moins d’un an après le grand maître  Jacques de Molay, conformément à la malédiction proclamée du haut du bûcher.  Heureusement, les rois passent et les monnaies restent !      
  Fils ainé de Philippe le Bel, Louis X dit Le Hutin, devint roi de France en 1314, à la mort de son père. Il fit pendre Enguerrand de Marigny sous prétexte de sorcellerie, et mourra lui même après un peu plus d’un an de règne. La malédiction jetée du haut de son bûcher par Jacques de Molay, s’accomplissait. Louis X aura laissé bien peu de traces de son passage auprès des numismates.  La brièveté de son règne ne lui aura permis de ne faire battre qu’une seule monnaie d’or. C’est une monnaie que nous retrouvons puisque Philippe le Bel l’a créée, et qu’elle sera frappée jusque sous le règne de Charles VII. Il s’agit de cette très rare et très jolie petite monnaie, appelée agnel d’or. Pièce de 4 grammes qui manque à beaucoup de collections.  Sur l’avers on trouve l’agneau pascal nimbé, derrière une croix avec pennon. La légende est la même que sur la monnaie de Philippe le Bel, mais sous l’agneau, on trouve les lettres LVd Rex (Louis Roi)  Une croix feuillue dans une rosace ornée de fleurons, cantonnée de quatre fleurs de lis orne le revers.
Philippe V dit Le Long était le second fils de Philippe IV Le Bel. A la mort de son frère Louis X le Hutin, Philippe se déclara régent du royaume. La femme du roi défunt, Louis X était enceinte, et elle donna naissance à un fils qui ne vécut que quelques jours. Philippe réunit alors l’assemblée des barons et des prélats, et fit voter la célèbre loi salique qui disait clairement que  » les femmes ne succèdent point au royaume de France « .
Son règne ne durera que six ans, mais il organisa avec beaucoup de clairvoyance et d’autorité les finances du royaume. Il prépara l’unification des monnaies par la suppression de la frappe seigneuriale. Il fit racheter de nombreux ateliers de frappe régionaux. (Chartres, Vendôme, Anjou etc.…) Lorsqu’il mourut, il ne laissait que des filles, et c’est alors son frère, Charles IV, qui montât sur le trône, se félicitant de bénéficier à son tour de la loi salique.
 
Philippe V le Long "agnel d'or" Charles IV le Bel "agnel d'or" Charles IV le Bel "petit royal"


     Pas plus que son frère Louis , Philippe V ne laissa de traces numismatiques d’importance.   Une seule monnaie d’argent, le  » Gros Tournois  » et une seule monnaie d’or, le très joli petit agnel, créé par Philippe Le Bel, qui sera repris à l’identique, avec bien sur le différent de Philippe V : Ph’REX (il sera ajouté en fin de légende : une croix, un trèfle, un croissant ou une étoile, pour le différencier de l’agnel de Philippe le Bel)  Cette charmante petite monnaie d’or sera frappée en 1316 et pèsera 4.136 grammes. On retrouvera sur l’avers l’agneau devant un gonfalon et à l’avers une croix feuillue, dans un quadrilobe cantonné de quatre fleurs de lis. L’agnel de Philippe V bien qu’assez rare, se rencontre plus fréquemment que ceux de Philippe IV et de Louis X
     Dernier fils de Philippe Le Bel, Charles IV Le Bel devait succéder naturellement à son frère Philippe. Celui-ci n’avait que des filles et il avait fait adopter la loi Salique, qui les écartait de l’accession au trône de France. Charles IV dit Le Bel, n’aura à son tour que des filles, et il sera le dernier des Capétiens à régner. Il renforcera l’autorité royale en soumettant les barons, ses guerres le presseront de renflouer le trésor, il affermira la monnaie, et généralisera l’impôt sur le sel. Il confisquera presque toute l’Aquitaine à l’envahisseur Anglais, et sa justice sera implacable vis à vis des grands du royaume. Nous sommes en plein Moyen-âge, et les notables des villes réclament une charte les émancipant des droits seigneuriaux. A Bergerac, après moultes discutions et rétribution sonnante, cette charte est signée avec le seigneur du lieu Hélie RUDEL, et c’est le roi Charles IV le Bel qui, après avoir enlevé Bergerac à l’Anglais, signera la lettre de confirmation des privilèges accordés à la ville. Cette lettre sera rédigée en Juin 1322, par l’administration (déjà) parisienne, et contiendra les 29 articles des libertés et franchises communales.
Documents :  »  retenus dans un coffre fermant à cinq clés, dans la tour du consulat, où étaient les anciens papiers. Privilèges écrits en cinq peaux de parchemin dans un coffre en cuir en forme de balance. Lettres du roi Charles, confirmant les dits privilèges, et autres lettres contenant l’exemption des tailles.  »
Pour toute trace numismatique, Il fera frapper trois monnaies d’or, et heureux le numismate qui pourra retrouver dans ses plateaux un agnel d’or,très rare mais tout semblable à ceux frappés par son père et ses frères. Il portera en différent au dessous de l’agneau les lettres : KL’ REX. Le Royal d’or est une monnaie du plus pur style gothique, à l’avers le roi est debout  sous un dais, couronné et tenant un sceptre et au revers on retrouve la croix feuillue, dans un quadrilobe cantonné de quatre fleurs de lis. Son poids est de 4.2 gr. C’est une superbe monnaie qui manque à beaucoup de collections.   Deux exemplaires de très belle qualité, issus d’un trésor, viennent de se vendre à Drouot. Dernière monnaie d’or de Charles le Bel, c’est un petit royal, monnaie toute semblable à la précédente, mais qui ne pèse que 2.1 gr et qui n’est connue qu’à deux exemplaires.

 
Philippe VI de Valois "royal d'or" Philippe VI de Valois  "parisis d'or" Philippe VI de Valois   "écu d'or"
Philippe VI de Valois  "Lion d'or" Philippe VI de Valois  "Pavillon d'or" Philippe VI de Valois   "couronne d'or"
Philippe VI de Valois  "double-royal d'or" Philippe VI de Valois   "Ange d'or" Philippe VI de Valois  "Florin George
   
  Philippe VI de Valois  "chaise d'or"  

  A peine Philippe VI de Valois avait-il succédé à son cousin germain Charles IV Le Bel en 1328, qu’il décida d’abandonner la simplification monétaire, laborieusement mise en place par Philippe le Bel et ses trois fils. Pour la plus grande joie des numismates actuels, il créera de nouveaux types, alors inconnus dans le royaume de France. Nous sommes à la veille de la guerre de cent ans, et la main mise de l’Angleterre, principalement sur l’Aquitaine, sera parfaitement reconnaissable sur plusieurs monnaies, essentiellement régionales.
Rappelons-nous qu’ Edouard III d’Angleterre, (petit fils de Philippe le Bel) après avoir prêté hommage à Philippe en 1329, se déclara roi de France en 1339, après la soumission des Flandres.  Il en résulte une explosion de superbes monnaies gothiques, qui demeureront autant de petits chef-d’œuvre.
  Le  règne de Philippe VI de Valois représentera pour beaucoup de collectionneurs, la période la plus faste de la numismatique d’or Française.
  Si Philippe VI eût beaucoup de revers à essuyer coté Anglais, prise de Bergerac en 1345 par le comte de Derby, défaite maritime catastrophique de l’Ecluse, fuite du roi et mort de nombreux grand vassaux à Crécy, on lui doit le rattachement du Dauphiné à la couronne de France. C’est lui qui a créé la gabelle, ce premier impôt qui lui conférait le monopole de la vente du sel. A sa mort en 1350 le royaume est en très mauvais état, financier et militaire.
En 1338, c’est à Philippe VI que les héritiers des RUDEL – PONS cèderont leurs droits de privilèges et de tailles sur la cité de Bergerac. Dès lors notre ville passera à la couronne de France     
(sources: photos du catalogue de la vente: Berthelot – Vinchon du 29 Octobre 2002)